D'une porte, celle de l'atelier
Lorsque mes trois filles eurent effectué leur rentrée, il fut grand temps pour moi d’envisager la mienne. Depuis quelques mois, j’y pensais mais je n’osais pas trop croire à sa réalisation et c’est fébrile que je m’étais inscrite aux Ateliers des Beaux Arts de la Ville de Paris. Il est dit que c’est pris d’assaut, que les places de libre sont rares et… je fus acceptée à l’atelier de la rue Eugène Varlin, à un quart d’heure de marche.
Depuis fin septembre, tous les mercredis soirs, qu’il pleuve ou qu’il vente, mon petit panier au bras, j’y cours, j’y vole et abandonne sans remord les filles, leur papa, le chat et même Fenêtres sur la cour. Oui, j’ouvre une nouvelle porte, la cinquième, celle d’un atelier de peinture dirigée par Sarah qui nous soumet des directives mais très vite nous incite à notre propre expression ; c’était ce dont j’avais envie et besoin : m’exprimer avec un certain matériau tel l’huile (incompatible dans un petit appartement) entendre des appréciations constructives, sous l’œil stimulant de condisciples.
A l’atelier, il y a ceux qui parlent volontiers à Sarah, d’autres qui émettent leur doute ou leur insatisfaction face à leur travail et ceux qui le réalise en silence. Je suis concentrée avec la crainte de ne pouvoir rendre ce que je perçois; mais avec un contentement délicieux, je ne me lasse pas d’étaler mes couleurs, de manier mes pinceaux et cela pendant trois heures d’affilées. Je n’ai ni faim ni soif et j’en ressors rassasiée, rassérénée et ravie.
La Ville de Paris fournit le papier, l’acrylique, les pinceaux ; mais possédant quelques matériels des années d’avant, je préfère emmener le mien. Dans mon petit panier (tout de même, ce n’est pas celui des années 70) s’y trouvent un carnet de croquis, de longs pinceaux bien usés, des boites débordantes de tubes bien sales, d’une boite vénitienne pour les pastels à l’huile bien émoussés et un flacon d’huile de lin.
Lors de la création de Fenêtres sur la cour, j'étais loin de me douter que ce blog de mots et d’images me redonnerait confiance et surtout envie ; j’ai retrouvé le goût des belles choses, le besoin de rencontrer d’autres créatrices de mots, de couleurs, de merveilles, d’instants. J’ai appris la tolérance et le partage, j’éprouve chaque jour le désir de pousser de nouvelles portes et je chemine, enfin sans peur, vers ce pourquoi j’étais faite.
Texte et photos de caroline_8