Mais où est donc passé l’automne ?
Ou comment la colère a pris le pas sur la tristesse
Je me trouvais bien courageuse d’avancer sans trop de dégât sur le chemin de ma peine. Avec Maman, nous avions beaucoup parlé et un peu pleuré. Il le fallait car vivre, c’est apprendre à perdre, à mourir un peu.
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De retour parmi les miens, la vie quotidienne me happait à nouveau ; agir, ne pas penser, concentrée sur les tâches et survivre… Le jour, peu d’allant face à ma vulnérabilité et aucun goût pour le plaisir: l’ombre de moi-même. La nuit était entrecoupée de mauvais rêves, de tout ce qui fait peur et angoisse, obstacles à simplement être bien. Et puis aucune envie de parler de sa disparition aux personnes rencontrées, comme si de ne pas en parler cela me permettait de ne pas réaliser son absence… Ce refus d’accepter la réalité constitue une sorte d’auto-défense devant l’inéluctable.
Je faisais de la résistance et en quelque sorte je m’interdisais d’être heureuse de peur de me sentir coupable d’être toujours là, auprès de mes filles alors que leurs cousins n’ont plus de maman… Tôt le matin, je me réveillais fatiguée et des sanglots dans la gorge, pleine de colère retenue car qui aurais-je pu invectiver à juste titre : personne ! La colère, c’est l’expression d’une forte charge émotionnelle.
J’en étais à me dire qu’un quart de comprimé avant de dormir m’aiderait grandement à passer cette épreuve, lorsqu’il y a quelques jours, trois évènements se sont enchainés et provoqués une envie de vivre enfin : le premier m’a donné un but, mais je vous en parlerai plus tard, le deuxième fut l’appel de H. une bien belle personne, qui a su trouver les mots pour m’autoriser à vivre (acceptez alors de prendre du plaisir, sans aussitôt me sentir coupable) et à faire ce que je devais faire depuis si longtemps : il est grand temps d’être bienveillante avec moi. La disparition de ma sœur (lui donner une nouvelle place en moi, une place qui ne m’empêche plus de vivre, d’aimer et d’agir) est sans doute l’occasion de me poser les bonnes questions et surtout d’en trouver la réponse. Le troisième évènement, c’est la lecture du billet de Vanessa sur la créativité de chaque jour; ceci peut être le début d’une bonne réponse que je développerais bientôt.
J'ai écrit ce billet, il y a quelques jours déjà et l'automne n'est toujours pas réapparu. Par contre dans la maison du bout du monde, l'été s'est installé... et je vais beaucoup mieux.
Texte de caroline_8 et collage mural et urbain de Miso